par Yamni Benguigui,
Ministre déléguée, chargée de la Francophonie
Le Forum mondial des Femmes Francophones est à ce jour la plus grande mobilisation de la société civile portée par les femmes francophones et en français, alors que 90 % des consultations internationales se tiennent en anglais. Il réunira plus de 1000 femmes venues de 77 pays de l’espace francophone. Après Paris, pour la 2ᵉ fois dans l’agenda international, le Forum mondial des Femmes Francophones impulsera des recommandations portant sur leur statut, leurs droits, leur avenir, leur rôle dans la restauration de la paix et le développement de leur pays. Ce forum a pour objectif d’accélérer l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Les conclusions du Forum seront les contributions directes des femmes francophones à la Déclaration solennelle du prochain Sommet de Dakar (Sénégal). La question des droits des femmes dans l’espace francophone est une priorité de mon action : l’annonce du 1ᵉʳ Forum Mondial des Femmes Francophones a été faite à Kinshasa lors du 14ᵉ Sommet de la Francophonie, qui s’est tenu en République Démocratique du Congo les 13 et 14 octobre 2012. Il avait pour ambition de porter un nouveau statut des femmes francophones, car les acquis des femmes francophones sont aussi menacés. Une prise de conscience urgente était nécessaire pour mobiliser et engager la communauté francophone sur ce sujet. L’objectif du premier Forum est atteint. L’appel des 700 femmes réunies à Paris le 20 mars 2013 a été entendu : leurs conclusions et leurs attentes ont été inscrites comme une priorité à l’agenda des instances et des pays francophones.
- L’organisation Internationale de la Francophonie a lancé le 1er Réseau francophone pour l’égalité Femme-Homme le 25 octobre dernier.
- Le site « Terriennes » de TV5Monde est désormais dédié au Forum Mondial des Femmes Francophones.
- Au mois de novembre 2013, lors de la Conférence Ministérielle de la Francophonie, j’ai demandé au nom de la France qu’une déclaration solennelle et spécifique sur les droits des femmes soit élaborées et annexée aux conclusions du prochain Sommet de la Francophonie.
- Et, comme l’a annoncé le Sénégal, nous nous réjouissons que le 15ème Sommet qui se tiendra à Dakar à l’automne 2014 ait pour thème, « Femme et jeunes en Francophonie : vecteurs de paix, acteurs de développement« .
La RDC, où nulle part ailleurs la question des femmes n’a été autant au cœur de tous les défis, a souhaité accueillir le 2ᵉ forum mondial des Femmes francophones, alors que le Congo a déclaré l’année 2014, année de l’éducation. Ce forum fait suite au 14ᵉ Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement de la Francophonie d’octobre 2012 à Kinshasa. Face à la déscolarisation précoce et la non scolarisation des filles, véritables freins au développement, face à l’ignorance et à la régression des droits des femmes, l’éducation des filles est le rempart, est la solution. C’est le premier des droits. L’école, c’est l’autorité de proximité qui donne aux filles et aux femmes les moyens de s’émanciper par l’éducation et la formation professionnelle : le savoir c’est le pouvoir, le pouvoir de connaître ses droits, le pouvoir de lutter contre les préjugés, le pouvoir de travailler, le pouvoir de transformer la société. Savoir, c’est prendre le pouvoir. La question de « la scolarisation des filles, le premier des droits », sera au centre des réflexions autour de trois grands thèmes : « Femmes et Éducation » – « Femmes et Pouvoirs » – « Femmes, actrices de la Paix ». L’objectif de ce deuxième Forum vise l’égalité de droit et l’égalité de fait. Pour tendre à cette égalité juridique, nous demanderons l’accès et le maintien de toutes les filles à l’école jusqu’à 16 ans. Nous savons que l’action conjuguée de l’école et de la loi permet de faire avancer les droits des femmes. Pour cela, nous devons non seulement promouvoir la prolongation de l’âge obligatoire de la scolarité pour les filles dans tout l’espace francophone, mais encore nous en donner les moyens. Il s’agit de commencer à compenser les effets de longue durée causés par l’absence des filles à l’école, réparer les torts séculaires faits aux femmes. (Les sociétés se sont amputées de forces vives !) et ainsi de tendre à l’égalité comme résultat. Les efforts spécifiques en matière de scolarisation des filles visent à : aider les parents à couvrir les frais de scolarité ; soutenir le plaidoyer auprès des familles pour laisser les filles aller à l’école ; former des institutrices et instituteurs… Pour tout cela et pour soutenir les actions de l’OIF en matière d’éducation, je propose la création d’un fonds mondial francophone pour la scolarisation des filles. Je souhaite que le Forum parvienne à des premières recommandations sur ce projet. Ce fonds devrait reposer non seulement sur la solidarité des pays francophones, des instances internationales, mais aussi sur celle de tous les acteurs privés du développement. C’est en renforçant l’égalité de fait que les sociétés progresseront et que les démocraties seront totalement inclusives. Il est évident que sans volonté politique, rien n’est possible. Je pense particulièrement à la Tunisie où sans la volonté d’un chef d’État qui, il y a 50 ans, a décidé de scolariser filles et garçons, il n’y aurait pas eu de révolution démocratique possible. La Tunisie est un exemple qui perdure. C’est aussi le 1ᵉʳ des pays arabes à avoir fixé dans sa constitution l’égalité homme-femme…. La scolarisation des filles est le premier des droits. Une fille scolarisée jusqu’à 16 ans ne perpétuera pas systématiquement la chaîne des mutilations sexuelles ! Au Ghana, la Constitution, qui a aboli des pratiques traditionnelles préjudiciables, et les efforts de scolarisation des filles et des garçons, ont permis d’obtenir des résultats marquants : 16 % seulement des adolescentes sont excisées contre 60 % des femmes de plus de 40 ans ! C’est bien le savoir et la conscience qui ont conduit les femmes francophones à se réunir à Paris l’an dernier. C’est bien le savoir et la conscience qui les conduiront à Kinshasa pour poursuivre les travaux qui nous permettront de donner un levier à leur mobilisation : le fonds mondial francophone pour la scolarisation des filles ! Je remettrai personnellement les conclusions du 2ᵉ Forum au Secrétaire Général de l’Organisation internationale de la Francophonie, son excellence Monsieur Abdou Diouf : elles seront la contribution des femmes de l’espace francophone à la préparation du 15ᵉ Sommet de la Francophonie de Dakar. Les droits des femmes dans l’espace francophone sont une priorité pour la France, pour le Président de la République, François Hollande, pour le Gouvernement français qui soutient l’initiative du Forum depuis son lancement. Les Droits des Femmes sont le baromètre implacable de l’évolution démocratique et égalitaire des sociétés.